LES  150 ANS DU CHEMIN DE FER A AULNOYE

LE CHEMIN DE FER A AULNOYE

 

            Le chemin de fer "passe" à Aulnoye en 1855 date de l'inauguration officielle de la ligne de chemin de fer de Paris à Erquelinnes.  Il y a donc exactement 150 ans cette année!

 

            La gare d'Aulnoye, si l'on peut l'appeler de cette façon, n'est qu'une vétuste baraque en planches située au niveau de la voie non loin du "pont de ciment" qui, à cette époque était un pont métallique….

 

   Cette ligne Paris Erquelinnes est la concrétisation de la volonté de plusieurs hommes célèbres mais surtout du baron James de Rothschild qui avait créé 10 ans plus tôt (le 20 septembre 1845) la "Compagnie de Chemin de Fer du Nord".
  Le baron De Rothschild, banquier de son état, avait "flairé" la possibilité de gagner énormément d'argent avec le chemin de fer. En effet, la découverte de la houille dans le bassin du Valenciennois avait nécessité dès 1838 la construction d'une ligne de chemin de fer privée de Abscon à Saint Waast afin de transporter ce minerais plus facilement et plus " rentablement " pour les Mines d'Anzin. Mais il fallait désenclaver et fournir cette houille aux industries situées vers Lille et vers Paris. Aussi, en 1846 est inaugurée une ligne de chemin de fer de Paris à Lille avec liaison vers Bruxelles, et un embranchement vers Valenciennes.  
     James De ROTHSCHILD  

 Il faut noter que la Belgique est très en avance sur la France sur le plan ferroviaire à cette date; et que c'est la France qui relie ses lignes à la Belgique!!  

            Monsieur de Rotchchild comprit très vite les avantages à relier les bassins houillers entre eux y compris ceux des pays voisins de la France! C'est ainsi qu' en 1855 le chemin de fer passe à Aulnoye. En 1858 une remise pour deux locomotives à vapeur est construite à Aulnoye, puis, la même année un embranchement Hautmont - Mons - Bruxelles donne à la "Compagnie du Nord" les avantages suivants:

 

-   Un désengorgement de la ligne Paris - Lille- Bruxelles par Douai.

-   Une liaison voyageurs et marchandises Paris - Bruxelles plus courte par Aulnoye que par Lille donc plus rapide et plus rentable.

-   La mise en liaison des bassins houillers et des industries du nord de France et de la Belgique.

-   En passant par Erquelinnes, la mise en liaison de Paris avec l'Allemagne ( bassin de la Ruhr) par Liège et même les pays de l'Est comme la Russie!

 

          Le transport des marchandises et des voyageurs s'intensifie, et Aulnoye devient un  "nœud ferroviaire " important: Paris - AULNOYE - Bruxelles;               Paris - AULNOYE - l'Allemagne via Liège; Valenciennes - AUNOYE - Thionville….

 

une véritable gare et un vrai dépôt de locomotives s'imposent……

 

LA GARE D'AULNOYE ET LE PREMIER DEPOT:

 

            En 1868 la "Compagnie du Nord" décide de construire une gare et un dépôt.

 

     La gare, non excusez moi, en termes de chemin de fer ce n'est pas une gare mais un " bâtiment voyageurs "  (BV) vous la connaissez c'est celle d'aujourd'hui et au même emplacement! Constituée de briques rouges elle est typique des gares du Nord.

 

     Le dépôt: je vais l'appeler" le premier "…

            Ce dépôt était grossièrement situé à l'intérieur d'un triangle formé par les rues dont les noms contemporains sont : la rue Gambetta, la rue Ferrer et la rue Voltaire. Vers Maubeuge, le "pont de ciment " en était une des extrémités, du côté Paris c'est le passage à niveau de Cayenne  qui le délimitait.

            Ce dépôt comportait 2 remises semi- circulaires afin de mettre à l'abri 40 locomotives, à vapeur, bien entendu! Ces remises étaient desservies par deux plaques tournantes. (le principe d'une plaque tournante est le suivant: une voie y arrive, on monte une locomotive sur ce "plateau tournant" on fait tourner ce plateau avec la locomotive et on oriente le tout vers une entrée de remise qui comportait à cette époque 20 remises. Ce dispositif permettait aussi de "faire faire demi tour" à une locomotive.) On remise ainsi beaucoup de locomotives sur une faible surface et pas besoin de triangle de retournement! Ces locomotives et ces wagons il fallait bien les réparer! Alors on a construit des ateliers de réparation. Il fallait aussi pouvoir recevoir des trains de marchandises et aussi former des trains complets pour telle ou telle destination; un triage a donc été construit. Tout est fait pour les marchandises et les voyageurs alors? Ils ne sont pas oubliés mais le trafic voyageurs est très inférieur au trafic marchandises alors une petite remise pour wagons voyageurs a été construite sur la gauche de la gare pratiquement au niveau du carrefour actuel des rues Gambetta, Jean Jaurès, Rue de Maubeuge. Et pour manœuvrer tous ces wagons à bon marché une écurie composée d'une dizaine de chevaux, oui! oui! une écurie, située face à la remise à voitures voyageurs soit actuellement sur l'ancienne place du marché: place Serge Juste.

 

 

          Ce premier dépôt ne cessera de grandir jusque en 1913; on double la capacité d'une des rotondes,  on augmente le nombre de voies de triage, des dortoirs pour les chauffeurs et mécaniciens sont construits etc…; mais enclavé entre trois rues le dépôt commence à étouffer….et… en 1914 le dépôt est détruit par les bombardements. Après la guerre on reconstruit un deuxième dépôt….

LE DEUXIEME DEPOT:

                  L'expérience du dépôt enclavé entre trois rues avait fait réfléchir les responsables du chemin de fer…. De plus, la proximité des logements des ouvriers  bâtis le long et entre les voies de Paris et de Valenciennes, côté passage à niveau, posait un autre problème. Ce passage à niveau a été " baptisé"  passage à niveau de Cayenne car les ouvriers qui y habitaient en cité, effectuaient tous les travaux pénibles et très dangereux comme par exemple " l'enrayage" des wagons au triage et cela par tous les temps!( l'enrayage d'un wagon est le blocage en pleine course de celui-ci dans le but de l'arrêter en un endroit précis et de ne pas tamponner trop fort le wagon qui le précède.) Ce blocage s'effectuait à l'aide d'un sabot que l'ouvrier plaçait à la main devant la roue du wagon et à pleine vitesse….. On a comparé ces ouvriers à des forçats et donné tout naturellement au passage à niveau le nom de passage à niveau de Cayenne…

De plus, ces ouvriers vivaient, travaillaient, dormaient dans l'enceinte même du chemin de fer et étaient de ce fait corvéables à merci 24 heures sur 24 sur leur lieu même de travail, mais  retour du bâton, en cas de grève comme en 1910 ils occupaient aussi leur lieu de travail…. Et cela à fait réfléchir la direction des chemins de fer…

Pour toutes ces raisons, un deuxième dépôt fut construit mais ailleurs…

           

             Il est bâti en grosse partie sur le territoire de Leval sur le site actuel de "La Florentine" que vous connaissez! et cela de 1920 à 1926.

 

Remises à locomotives et béton armé            

Il est très différent d'aspect du premier dépôt. En effet, le béton armé vient d'être inventé et déjà utilisé en construction pourquoi pas pour le chemin de fer?

             Il sera donc en béton armé! et adapté, autant que faire se peut, aux évolutions futures des locomotives. Il est en effet exclusivement réservé à l'entretien des locomotives à vapeur ( plus de wagons ni de triage …) Il comporte donc un atelier pour les grandes réparations (on y démonte et remonte une locomotive complètement), un atelier pour les petites réparations (pas de gros démontages) mais de l'entretien courant. Il est capable de remiser de nombreuses locomotives mais cette fois la rotonde est abandonnée au profit d'un gril de stationnement partiellement couvert. (la rotonde prend beaucoup de place et quand une locomotive déraille sur le pont tournant et /ou tombe dedans, toutes les locomotives sont bloquées dans les remises et inutilisables tout le temps de la remise en état.

 

Une locomotive à vapeur ça "mange" et ça "boit"! sont alors construits:

 

- Un parc à combustible stockant des tonnes de charbon et aussi des briquettes (sorte de parpaing constitué de charbon pulvérisé et lié avec du brai, le tout chauffé et pressé pour lui donner cette forme) et un pont transbordeur de 5 tonnes pour manipuler tout ce combustible!  

Le toboggan

- Un toboggan, sorte d'énorme caisse capable de contenir plusieurs centaines de tonnes (400 tonnes) de charbon de qualités différentes et capable de les mélanger entre elles et de décharger une partie de ce mélange dans le tender de la locomotive qui passe alors sous cette sorte de caisse. 

 

Grue à eau

- Des grues à eau, sorte d'énormes robinets tournants fixés au sol, capables de remplir de 13 à 38 m3 d'eau le tender des locomotives. Ces grues à eau étant elles mêmes alimentées par deux châteaux d'eau.

- Une Tour Florentine (que vous connaissez) construite en 1921-1922 qui servait à diriger, à aiguiller les locomotives sur toutes les voies de ce dépôt, et aussi à rappeler l'heure aussi bien aux ouvriers qu'à tous les habitants des cités construites cette fois encore, tout près, mais en dehors des emprises du chemin de fer…

 

- Un triangle de retournement (il n'y a plus de pont tournant) servant à la sortie de ce dépôt à orienter la locomotive du bon côté suivant qu'elle allait "faire un train" pour Paris ou Bruxelles.  

- Des installations annexes:

Une centrale électrique.

Une sablerie.

Une huilerie et lampisterie.

Un atelier de régulage.

Bureaux, vestiaires.

Dortoir - réfectoire (qui existe toujours). Etc…   

 

- Le triage:

            Aulnoye étant devenu un centre ferroviaire très important, le triage fut construit sur la commune de Bachant où vous le voyez encore. Un atelier de réparation de wagons a aussi été implanté sur cette commune rue de l' Horipette actuellement; (les bâtiments existent toujours).   Le triage a été agrandi en 1924 et sans cesse modernisé.

En 1938 un grand bouleversement secoue les chemins de fer! On regroupe les compagnies de  l'Est, du Nord, de l'Ouest, du Sud-Ouest, du Sud-Est et de Méditerranée; qui étaient indépendantes, sous un nom que vous connaissez bien: la " Société Nationale Des Chemins de Fer Français" ou SNCF.

Un autre événement va modifier le cours de l'histoire du dépôt c'est la guerre 1939-1945. Bien sûr le dépôt subit les destructions des bombardements, mais il sera remis en état! Malheureusement (pour le dépôt) les locomotives électriques pointent le bout de leur nez…. En Allemagne comme ailleurs, mais plus dans ce pays, la pollution en ville due aux locomotives à vapeur est très importante et décriée. La firme Siemens par exemple possède depuis longtemps des petites locomotives électriques lui donnant toute satisfaction. La Suisse, elle aussi possède des locomotives électriques, alimentées par ses nombreuses usines hydroélectriques.

La France n'est pas en reste et dès 1954 la ligne Valenciennes - Thionville est électrifiée. C'est la mort lente des locomotives à vapeur. Ces braves locomotives qui avaient une âme et qui ont rendu tant de bons et loyaux services depuis quelques 150 ans disparaissent peu à peu. Le dépôt a bien essayé de résister en accueillant des automoteurs diesel, il a même accepté de servir de simple remise à ses concurrentes les locomotives électriques, mais rien n'y fait. 

Il rend l'âme en 1963.   Le dépôt est alors  à l'abandon, les herbes folles l'envahissent, il est livré à lui même, les outrages du temps le marquent mais surtout les dégradations humaines….Devenu dangereux il est en partie détruit. Il est ce que vous connaissez actuellement…. 

 

En 1991, les locomotives électriques n'ayant pas de dépôt, on en rétabli un pour elles sur le site du premier dépôt à la gare d' AULNOYE- AYMERIES où vous pouvez le voir actuellement. C'est un retour aux sources….. 

 

 

 

Plan du Dépot d'Aulnoye en 1921

 

 

              Recherches  réalisées par Monsieur Ducrocq  Alain.